Chez les Mercenaires, les hommes comme lui tranchent souvent avec le reste des troupes. Il n'est pas de ces montagnes de muscles saillants qui fendent la foule à l'aide de leur seule carrure imposante. De grande taille malgré tout, sa stature d'apparence chétive comparé à ses frères d'armes cache une musculature sèche, entrainée avec soins et douceur. Personne n'irait douter des capacités physiques de Lisandro durant un combat et même ceux dont soulever la fonte est une vraie religion ne se risqueraient pas à énerver l'homme aux yeux de saphir.
Ses origines du Sud ressortent à travers ses traits à la fois harmonieux et carrés, dotés d'une quiétude presque froide par moment, rehaussés par des yeux d'un bleue intense presque électrique et encadrés par de courts cheveux de jais ramassés en arrière avec quelques mèches rebelles et éparses ça et là. La vie de guerrier ne lui a pas apportée l'habitude de se raser de façon journalière et il n'est pas rare de voir une barbe de quelques jours égayer ses joues creuses aux pommettes hautes. Sa peau n'est pas d'albâtre sans tout autant être d'ébène, son grain fin de couleur pêche est de ceux qui aiment à prendre le soleil des longues journées d'été tout en gardant le plaisir de savourer la morsure du froid hivernal.

Il s'habille souvent de manière légère, ayant des gouts particulièrement raffinés en matière de vêtement. Chemise de lin blanche et cintrée, veston de cuir fin aux teintes sombres, un ceinturon sans prétention pour tenir un pantalon mettant en valeur ses jambes galbées qui se termine sur des bottes hautes adaptées à de longues heures de marche ou de chevauchées.
Il en vas de même en combat, préférant l'armure composite-hydride à une grossière armure lourde ou une armure légère trop évasée. En guise d'armement il est plutôt polyvalent mais là où il brille de milles feux c'est avec sa targe et son épée. Surnommée "Fougue", sa lame est légèrement plus fine et plus longue que la normal, avec une garde en semi-coupole qui protège sa main directrice, adaptée pour un style plus aérien sans perdre pour autant de sa violence. On le compare souvent à un fauve lorsqu'il combat et si Vhalmen est le Lion, Lisandro a quant lui l'image du Guépard.

Le premier trait qui domine dans la personnalité de Lisandro est un ascétisme assumé. Il se contente du nécessaire, faisant fit du superflu autour de lui, allant droit au but sans prendre en compte codes et conventions qui pourraient se dresser sur son chemin. D'un naturel très déterminé, quand il désire obtenir quelque chose il se donnera tout les moyens d'accomplir son but dans la plus grande justesse possible. Ce n'est pas un sans coeur pour autant, homme de parole, d'honneur et de droiture, il ne sabrera pas les jambes de son voisin pour se garantir une victoire certaine. Bien qu'il soit peu avenant à voir comme ça avec ses yeux perçant et sa loquacité aussi froide qu'un vent du nord, il reste un grand assoiffé de liberté aux idées tantôt sombre ou lumineuse. Mais force est de constater qu'il ne se laisse que trop rarement allé au rire, ne serait-ce même qu'au sourire. Une chape d'ombre lourde comme du plomb semble avoir élue domicile sur son visage, le figeant dans un éternel air revanchard.

Et pourtant au delà de ça Lisandro c'est un croqueur de vie qui consomme les petits plaisirs en les enfilant comme des perles sur un collier. Il aime se vêtir avec un gout certain, amateur de grand vin et bonne gastronomie, c'est un bon vivant enfermé sous une carapace de guerrier imperturbable. De même il adore voyager et laisser ses yeux divaguer au long des plus beaux panoramas que le pays peut lui offrir, respirer un air frais et légèrement embaumé de fragrances florales à l'image des saisons qui défilent. Ou encore laisser ses oreilles se faire bercer par les musiciens talentueux qu'il croise dans quelques auberges, sur une place de marché durant une mission, le soir depuis les hauteurs de sa chambre d'une nuit. Il n'y que du côté des femmes où il semble ne pas aller. Un sujet pour le moins épineux que tout Mercenaire évite sagement d'aborder avec lui.

Lisandro Allabasta est le fils ainé d'une famille modeste de Balden. Ses parents étaient tout deux des Mages, son père de l'Art et sa mère du Cristal. En dessous de lui, une soeur cadette et un autre frère en guise de petit dernier.
Son enfance fut pour le moins heureuse bien qu'il ne décida pas de marcher sur les pas de ses parents, préférant la voie du corps à celle de l'esprit. Il avait pourtant une affinité avec le Cristal, tout comme sa soeur cadette, mais ce n'était pas là un fait qui suscitait la passion chez lui. Ses passes-temps favoris revenaient à partir dormir à la belle étoile avec ou sans autorisation, monter a cheval aux côtés du sympathique palefrenier de son quartier, apprendre l'escrime avec son ami d'enfance qui était fils de Garde Impérial. Ce sport, cette dépense physique, c'était tout ce qui le constituait et il se voyait mal apprendre par le biais de livres ou d'enseignements magistraux. D'ailleurs cela se sentit très jeune avec une assiduité scolaire pour le moins épisodique.

Le premier grand événement qui arriva dans sa vie pointa son nez à l'aube de ses dix-huit ans. Devenu majeur il allait désormais devoir faire preuve de parcimonie envers toute ses décisions future. Durant l'été il pesa les pour et les contres des voies qui le tentait pour son avenir. Mais tout cela n'eu qu'une maigre importance au final.
Jero, petit dernier de la famille, montrait depuis son plus jeune âge d'étranges signes de marginalisation par rapport a ses petits camarades. Bien entendu vue le caractère de ses ainés cela n'inquiéta pas outre mesure les parents Allabasta, tout comme sa nature à sortir se balader en extérieur à l'instar de Lisandro. Ce fut hélas bien trop tard qu'ils décelèrent en lui un Vif puissant qui avait grandi dans l'ombre la plus complète depuis son enfance. Alors âgé de treize ans, le cadet de la famille Allabasta fut le centre de faits-divers de toutes sortes: il perdait le contrôle le liant à son animal et sa raison s'émiettait de jour en jour. Jusqu'à l'emporter pour de bon, ce fut le père de Lisandro qui mit fin à la vie de son propre fils pour écourter ses souffrances. La peine de cette perte s'abattit sur la famille toute entière, un choc si puissant que sa mère en perdit presque complètement l'usage du Cristal.
C'est suite à cet événement majeur qui anéantit Lisandro pendant des mois entiers qu'il se décida finalement à choisir la voie de l'Epée. Son petit frère était du genre à suivre l'exemple de son ainé et il se jura que sa lame serait en force d'honorer les milles promesses de voyage qu'ils s'étaient faite en parlant ces longues nuits d'été. Déterminé comme il savait l'être dans les moments où le sérieux dominait chez lui, son côté disparate et papillon s'envola pour laisser place à un Lisandro plus mature.

Et sa lame, il la guida chez les Mercenaires de Niel. Ce groupe de fiers combattants libres le tentait déjà depuis un moment et désormais son choix était clair. De l'action, du combat, des découvertes, son nouveau train de vie n'allait pas être de tout plaisir il s'en doutait mais il s'y préparait déjà depuis un bon moment. Il allait être un petit jeunot au milieu de tout ces rudes gaillards, surtout taillé dans un fétu de paille comme il l'était, mais il n'avait pas froid aux yeux non plus. Il comptait bel et bien faire résonner les murs de la Forteresse de Niel du nom de Lisandro Allabasta. Et ce fut a la hauteur de ses attentes. Ses premières années furent effroyables d'épreuves en tout genre, de prises de becs avec plus gradé que soit ou avec des camarades de chambrés, l'ambiance n'était pas à la franche camaraderie tout les jours. C'était comme une grande famille avec ses bons et ses mauvais côtés et si quelques hommes étaient devenus comme de véritables frères pour lui, d'autres ne méritaient que le plus abjecte de son mépris. Néanmoins il continua son ascension sans se défaire de son air farouche, revenant voir sa famille à Balden tout les trois mois quand une permission lui était accordée.
Si lors de ses missions il se plaisait à faire vibrer l'acier au rythme des combats, il était loin d'imaginer que la Forteresse des Mercenaires serait l'endroit où son coeur allait vibrer lui aussi. Alors âgé de vingt-quatre ans, il se perdit d'amour avec une jeune recrue répondant au nom d'Ophélie d'Hellbersat. Ils se rencontrèrent de manière on ne peut plus fortuite, Lisandro faisant partie des examinateurs lorsque la jeune fille passa les épreuves pour entrer chez les Mercenaires. Les points communs entre eux ne semblaient pas être légions à les voir comme ça au premier coup d'oeil mais ils n'eurent aucunement besoin de grande conversation pour comprendre que leur coeur battaient à l'unisson. Un regard suffisait pour se parler, un dialogue s'établissait entre les lignes, comme si leurs pensées étaient synchronisées au même titre que leurs lames. Leur relation ne se dévoila pas au grand jour dés la première année, pour éviter qu'Ophelie subisse des railleries supplémentaires en plus d'être une femme. Mais dés lors qu'elle monta en grade, ce ne fut plus un secret pour personne.

L'arrivé de cette femme devenue prunelle de ses yeux fut le nouveau rayon de soleil qui éclaira la vie de Lisandro, restée teintée d'une couche inaltérable de sombre depuis la mort de son frère cadet. Il la présenta à ses parents sans attendre et elle fut accueillie les bras ouverts par toute la famille. L'entente était parfaite tant en sphère privé que sur un champ de bataille et ils coulèrent ainsi de nombreux jours heureux. Partenaires en mission bien que Lisandro soit plus âgé qu'elle de six ans, ils effectuaient à eux deux un boulot qui méritait le respect grâce à leurs capacités qui compensaient pour l'un les faiblesses de l'autre et vice-versa. Cet équilibre fut le fer de lance de leur avancée main dans la main et ils ne comptaientt pas arrêter l'histoire là: ce n'était pour eux qu'un point départ, une revanche sur la vie.
Mais d'avance Maitre-Destin se gaussait. Les événements politiques se déchainèrent, créant ainsi le chaos dans le pays tout entier. Le nouvel Empereur venait de clamer la Chasse aux Mages à travers le pays et ce non pas pour un emprisonnement mais pour des mises à mort sans merci. Il n'y avait aucun jugement à attendre de ces actions, seul le sang des Mages était demandé avec Dame Mort à leurs côtés. Pour Lisandro ce fut un coup dur à digérer, il comprit très vite que ses parents, sa famille même, allaient êtres la cible de tout l'Empire. Il s'en alla immédiatement demander une permission auprès de Vhalmen d'Ares, Chef des Mercenaires. Mais c'est avec une mine assombrie que ce dernier lui répondit qu'il venait de rallier les Mercenaires à la cause de l'Empire. Cette journée resta à jamais marquée dans l'esprit de Lisandro: il se sentait déchiré, trahit, seul, impuissant, avec l'envie de crier son désarroi, de dégainer sa lame et de laisser le sang parler pour lui. Il osa l'interdit en contestant l'ordre direct de Vhalmen suite de quoi les deux hommes s'empoignèrent violemment. D'abord par les mots mais plus le ton montait et plus les armes faisaient sentir leurs appels puissants. Lorsque la violence fut de mise le combat ne dura pas éternellement et Lisandro se fit corriger en quelques passes par l'impressionnant Vhalmen.
Blessé tant physiquement que moralement, il fut placé loin des combats en convalescence chez les Mercenaires. Mais cela fut sans compter l'aide certaine qui lui apporta Ophélie durant ces épreuves. La jeune fille avait elle aussi de la fougue à revendre et prit sa revanche sur Vhalmen en assassinant son second, bras-droit des Mercenaires. Suite de quoi elle disparue, recherchée par ses anciens frères d'armes, répudiée d'avance. Lisandro feignit d'être complètement détruit par cette trahison, mais le couple était désormais bien au delà de ça.

Le plan était simple: Ophelie devait trahir les Mercenaires et les quitter pour de bon. Sans quoi elle ne pourrait venir en aide aux parents de Lisandro, aucune permission n'étant autorisée depuis que la Chasse aux Mages était ouverte. Il resta donc dans l'interminable attente d'un signe de vie de l'un d'eux, une validation comme quoi ils étaient bel et bien tous vivants de l'autre côté des frontières, en terre inconnue. Et cette validation, elle vint à lui mais bien loin de l'idée qu'il s'en faisait. C'est le nouveau Bras-Droit de Vhalmen, ancien troisième siège des Mercenaires, qui lui annonça qu'il rentrait d'une mission d'assaut sur une équipe de rebelle qui tentait justement de franchir la frontière. Et c'est devant les yeux de Lisandro qu'il ouvrit un baluchon dans lequel se tenait la tête de son père, encore sanglante et figée dans un cri de souffrance des plus infâmes. En cet instant précis ce fut comme si son coeur venait de s'arrêter, sa vie explosa en milles morceaux et son âme éteignit son feux virulent pour ne laisser que quelques braises tout juste bon à réchauffer son être en lambeaux. Le guerrier sembla bon d'ajouter qu'il n'y eu aucun survivant durant l'assaut mais Lisandro n'eu aucune réaction, ses pupilles saphirs voilées d'un sentiment inconnu et impossible a décrire. Il se leva, ceignit ses armes et partit s'entrainer aux chevalets de brette sans ajouter un mot tandis que le rire gras du Bras-Droit résonnait dans son dos.
Deux mois après ce fameux Bras-Droit perdit mystérieusement la vie durant une mission dans laquelle ils étaient tout deux envoyés.

Un an et quelques s'est écoulé depuis. Plus d'Ophelie, plus de parents, quant à sa soeur elle les avaient rejoint bien qu'elle était guérisseuse. Aujourd'hui encore Lisandro se demande pourquoi il est resté Mercenaires, pourquoi il obéit encore aux chiens de l'Empire et aux ordres de Vhalmen. Leurs relations se sont d'ailleurs calmées et les deux hommes se respectent à nouveaux comme c'était le cas avant leur dispute. Suite à sa blessure Lisandro ne pus reprendre son activité là où il l'avait abandonnée... Il recommença donc à s'entrainer avec les recrues pour retrouver son ancien niveau, marmonnant de sombres pensées dans sa barbe de deux jours, laissant la mort se présager derrière ses yeux de saphir. A l'époque tout semblait si parfait. Le feux de son âme recommençait à bruler d'une fougue nouvelle, il ne savait pas encore vers quoi diriger cette énergie mais bientôt son jour viendra.